Les violents affrontements entre musulmans et chrétiens la semaine dernière dans un
quartier populaire du Caire ont fait douze morts et plus de deux cents blessés (bilan annoncé par la télévision d'Etat). Où l'on semble découvrir que le christianisme est de loin la religion la
plus persécutée dans le monde ! On parle beaucoup de la disparition progressive des chrétiens au Proche et Moyen Orient depuis le synode des évêques d'Orient
qui s'est tenu à Rome du 10 au 24 octobre 2010 et surtout depuis les attentats terroristes meurtriers perpétrés
contre les églises à Bagdad et contre les coptes d'Egypte, en particulier depuis les émeutes de ces dernières semaines. Les journaux se penchent enfin sur un phénomène douloureux, comme si cela
était un phénomène nouveau ! D.ieu sait que malheureusement ce n'est pas le cas.
Les évêques et patriarches le constataient au Synode : les chrétiens au Moyen Orient ne cessent de diminuer partout, et pour des raisons diverses. Partout au Moyen-Orient ? Est-ce si sûr ? Partout, à l’exception d’Israël, où le nombre de chrétiens n’a cessé de croître ces dernières décennies.
Il y avait un peu plus de 34000 chrétiens en Israël après la création de
l’état en 1948. A l’époque, ces populations chrétiennes étaient en grande majorité arabes avec une petite minorité de chrétiens d’origine arménienne. Elles étaient concentrées
à Jérusalem, Haïfa et dans la région de la Galilée, au nord du pays.
En 2011, la population chrétienne d’Israël (sans parler des
Territoires de la Judée-Samarie) se situe sans doute autour de 153 000 personnes (même s'il n'est pas évident d'obtenir des statistiques fiables)... Les chrétiens arabes restent
majoritaires, mais depuis le début des années 90, une population chrétienne russophone importante est venue grossir le nombre des chrétiens, qui sont par ailleurs très divers : orthodoxes
russes, roumains, arméniens, catholiques latins, grecs catholiques, melkites, maronites, syriaques, anglicans, luthériens, etc..., comme peuvent le constater les nombreux pèlerins qui se rendent
chaque année en Israël et en Palestine.
La liberté de culte, la liberté d’expression et de transmission existent pleinement en Israël. On doit d'ailleurs en dire plus ou moins autant du Liban, de la Syrie et de la Jordanie, malheureusement victimes d'une certaine émigration, ce qui a amené le Synode d'Orient à insister sur l'importance de trouver les moyens de contrecarrer les mouvements migratoires.
Certes l'Etat d'Israël ou ses fonctionnaires sont parfois maladroits et cela peut causer quelques petits ennuis, comme le reconnaît bien volontiers dans son dernier ouvrage "Echos d'Israël" le Père Michel Remaud qui vit en Israël depuis bientôt trente ans. Mais c’est un pays où les chrétiens ne sont pas menacés ou discriminés en tant que chrétiens. "Non, affirme-t-il, il n'y a aucune restriction à la liberté de culte pour les chrétiens en Israël. Il suffirait d'ailleurs de réfléchir quelques secondes pour comprendre que dans ce pays, où le tourisme religieux constitue une part importante du revenu national, l'Etat n'a aucun intérêt à étrangler les Eglises." (p. 73) Et si les autorités israéliennes sont parfois irrespectueuses à l'égard des chrétiens, la religion des intéressés en est rarement la raison. Le custode de Terre Sainte, le P. Pierbattista Pizzaballa (cité par Cathertine Dupeyron, dans son ouvrage : "Chrétiens en Terre Sainte : disparition ou mutation ?") le reconnaît lui-même : "Les discriminations qui peuvent s'exercer à l'égard des chrétiens ne sont pas liées à des problèmes de conscience religieuse, mais au fait qu'ils sont arabes" (p. 176) et donc constituant un danger potentiel, sans aucune autre considération.
Les pères du synode se sont intéressés à l'avenir des chrétiens dans toute cette région et ont réfléchi en profondeur sur le sens de la présence et de la vocation chrétienne au Moyen-Orient. Il faudrait aussi s'interroger sur le sens de la présence simultanée du peuple juif et de populations chrétiennes sur la terre d'Israël. La réflexion est en cours dans les milieux théologiques. Elle oblige en tout cas à repenser bien des vérités toutes faites et qui n'avaient pas été réexaminées depuis des siècles.